Communication à la presse
Affaire Ihsane Jarfi : le mobile de haine est retenu
Pour Arc-en-Ciel Wallonie il était essentiel d'exposer à la Cour les rouages de l'homophobie
La Cour d’Assise de Liège a prononcé ce 22 décembre un verdict de culpabilité à l’encontre de Mutlu Kizilaslan, Jérémy Wintgens, et Eric Parmentier, condamnés pour l’assassinat d’Ihsane Jarfi, un jeune homosexuel qu’ils avaient emmené en voiture dans la nuit du 21 au 22 avril 2012 à la sortie de l’Open Bar, un club gai de Liège. Son corps avait été retrouvé 10 jours plus tard abandonné dans un champ, nu et couvert de graves traces de coups et de lésions ayant entrainé sa mort. La préméditation n’a pas été retenue pour le 4e accusé Jonathan Lekeu.
Dans le cadre de ce procès, où la circonstance aggravante de crime de haine en raison de l’orientation sexuelle de la victime avait été retenue par l’acte d’accusation, la défense n’a eu de cesse de réfuter la motivation homophobe des accusés. Pour eux, tout comme une femme trop attirante serait responsable de son propre viol, il fallait trouver la faute dans le comportement et les paroles provocantes d’Ihsane Jarfi. Le jury a rejeté ce raisonnement fallacieux en reconnaissant nos arguments présentés à la Cour par notre avocat Maître Pascal Rodeyns. Les quatre accusés sont reconnus coupables de meurtre, avec préméditation pour trois d’entre eux, et de séquestration, commis avec la circonstance aggravante que l’un des mobiles est la haine, le mépris ou l’hostilité à l’égard de l’orientation sexuelle de la victime, sa race et ses convictions religieuses. Les jurés estiment que les accusés ont d’emblée identifié Ihsane Jarfi comme homosexuel et que le mobile homophobe transparait dans les propos de chacun d’entre eux. Il ne fait pas de doute qu’ils ont voulu donner une leçon à Ihsane Jarfi parce qu’il était homosexuel.
Ce jugement constitue pour nous un signal important. Il montre que les agressions touchant des personnes parce qu’elles sont homosexuelles ne peuvent être tolérées.
Arc-en-Ciel Wallonie regrette toutefois que le mobile de haine n’ait pu être retenu pour les faits de traitement inhumain et dégradant car dans son état actuel le code pénal ne le prévoit pas. L’évaluation des lois anti-discrimination doit être l’occasion de corriger ces lacunes.
Au terme de ce procès, nous réitérons notre soutien aux familles d’Ihsane Jarfi et de Mathieu Dozot, son compagnon. Arc-en-Ciel Wallonie sera toujours aux côtés de la Fondation Ihsane Jarfi, créée à l’initiative de son papa pour lutter contre toutes les formes d’homophobie.
Depuis la loi du 10 mai 2007 confirmant la loi du 25 mars 2003 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, les associations de lutte contre les discriminations sont autorisées à se constituer partie civile dans le cadre des crimes de haine. Arc-en-Ciel Wallonie a fait usage de ce droit car son objet est de lutter contre les différentes manifestations d'homophobie mais aussi de représenter, y compris en justice, les 19 associations membres de la fédération. Son objectif était en particulier de veiller à ce que cette qualification soit pleinement prise en compte par la justice.