23 septembre : Journée mondiale de visibilité de la bisexualité

Ce 23 septembre, à l'occasion de la journée mondiale de visibilité de la bisexualité et de lutte contre la biphobie, nous avons désiré donner la parole à deux personnes bisexuelles.

Bonjour, pouvez-vous vous présenter en quelques lignes.

Je m’appelle Vinciane et je suis une femme cisgenre de 48 ans. Je suis depuis toujours très impliquée dans le mouvement LGBTQI et j’ai même la chance d’en faire mon métier. Je suis mariée avec un homme, pour la 2e fois. Cependant, je suis bisexuelle et même pansexuelle dans la mesure où le sexe et le genre m’importent peu.


Je m’appelle Maxence, j’ai 26 ans, je suis médecin et militant LGBTQIA+ depuis plusieurs années. Je m’intéresse principalement aux questions de santé mentale et sexuelle au sein de la communauté et aux disparités de santé par rapport à la population hétérosexuelle et cisgenre.

Comment votre entourage comprend/accepte votre bisexualité ?

Vinciane : Il faudrait déjà qu’il soit au courant. Tout le monde me prend pour une hétéro. Très peu de personnes connaissent mon identité sexuelle. Il ne vient à l’idée de personne de m’interroger sur le sujet. Je ne rétablis la vérité que lorsque quelqu’un affirme que je suis hétéro. Et ça ne pose pas de problème.


Maxence : La majorité de mon entourage provient du milieu associatif LGBTQIA+, ce qui facilite les choses en termes de compréhension et d’acceptation. Pour ce qui est du reste de mes connaissances, c’est souvent plus complexe. Dans un premier temps, les gens ne songent jamais à la bisexualité lorsqu’ils savent que j’ai des relations avec des hommes. C’est un fonctionnement très binaire : « Il couche avec des femmes, il est hétéro ; il couche avec des hommes, il est gay. » La première étape est donc souvent de rappeler que la bisexualité existe. À la suite de cela, je suis fréquemment confronté à la suspicion d’être un gay refoulé qui se prétend bisexuel. Il y a très vite ce besoin de « prouver » ma sexualité, avec des questions du style « Oui, mais tu as recouché avec des femmes depuis ton coming out ? » ou « C’est quand la dernière fois que tu as couché avec des femmes ? »

Quelles sont les stéréotypes auquel vous devez faire face ?

Vinciane : *Que ça n’existe pas *Que c’est transitoire *Que je ne sais pas choisir mon orientation qui devrait être ou homo ou hétéro *Que je ne dois certainement pas être satisfaite.


Maxence : Je dirais que le premier stéréotype auquel je dois faire face, comme mentionné plus haut est celui de « La bisexualité n’existe pas, ce sont des gays refoulés ». Il s’agit d’un stéréotype particulièrement vicieux, parce qu’on peut finir par y croire soi-même à force de répétition. J’avais passé quatre ans sans avoir de relation affective ou charnelle avec une femme et, même en étant bisexuel moi-même, même en étant militant moi-même, j’avais fini par me demander s’il n’y avait pas un fond de vérité derrière cela. Après avoir renouvelé l’expérience avec une femme, ces doutes se sont vite évanouis, mais on en revient à ce besoin de (se) prouver son orientation sexuelle ; à devoir rendre plus de compte sur son identité que pour d’autres orientations sexuelles. Un autre classique est « Les bisexuels sont forcément infidèles » mais j’y ai été personnellement moins confronté.

Quelle est la place des bisexuel-le-s au sein de la communauté LGBTI ? Vous y sentez-vous compris et respectés ?

Vinciane : Elle est assez fort invisibilisée, mis à part dans le projet Gris Wallonie Bruxelles où il y a un réel désir de tenir compte de la bisexualité. Je me sens comprise et respectée même si je suis fortement invisibilisée, déjà du fait d’être en couple avec un homme.


Maxence : Oui et non. Je trouve qu’il y a une forte composante générationnelle dans l’acceptation des bisexuels au sein de la communauté. Les jeunes LGBTQIA+ sont beaucoup plus ouverts quant à la multiplicité des orientations sexuelles et des identités de genre, là où les personnes LGBTQIA+ de la génération de mes parents ou avant ont souvent une vision très « gay et lesbienne » (voire uniquement gay) de la communauté. J’y retrouve plus volontiers cette suspicion d’être un gay refoulé qu’avec les personnes LGBTQIA de ma génération ou plus jeunes. Évidemment, il y a toujours des exceptions et mon propos n’est pas de créer un bloc monolithique de « vieux gays fermés d’esprit » , la réalité est toujours plus nuancée que cela. Dans l’ensemble, en tant qu’homme bisexuel, on retrouve moins souvent ses pairs au sein de la communauté qu’en tant qu’homme gay et cela peut être facilement source de solitude, même lorsque le reste de la communauté s’avère accueillante.

Pourquoi est-ce que la journée de la visibilité bisexuelle est importante ?

Vinciane : Pour permettre aux personnes concernées de voir et comprendre qu’elles ne sont pas seules, que ce qu’elles peuvent vivre au quotidien n’est pas un cas isolé. Et en parler, c’est faire avancer les mentalités.


Maxence : Elle est importante pour que les gens comprennent que la bisexualité est une orientation sexuelle aussi valide qu’une autre. Je parlais plus haut du fait qu’on pouvait internaliser des stéréotypes négatifs sur sa propre orientation et c’est d’autant plus vrai lorsqu’on la découvre et qu’on essaye de l’apprivoiser. Se découvrir bisexuel au milieu de la binarité et des stéréotypes ambiants est souvent une épreuve. L’assumer devant les autres en est une autre. Mon espoir est que ce genre de journée permette de nous faciliter la vie en faisant évoluer les mentalités.


parler, c’est faire avancer les mentalités

Retour