Hasard de calendrier ? A l’heure où le colloque « Men having babies » se prépare à Bruxelles (voir notre article ici), la sénatrice Petra De Sutter défendait son rapport sur la GPA au Conseil de l’Europe. Entretien avec l’intéressée suite au vote inhabituel de la Commission des Affaires sociales ce mardi.
Ce rapport que tu as présenté, en quoi consiste-t-il ?
Le rapport comprend trois parties distinctes :
- La résolution qui est un résumé du rapport
- Les recommandations qui sont des propositions d’actions
- L’explicatif qui dresse un état des lieux, analyse les problèmes rencontrés, …
La résolution et les recommandations sont votées séparément.
Mon rapport dresse un bilan de la situation de la GPA à l’heure actuelle et propose une légalisation de la GPA non commerciale au sein des états membres en pointant l’intérêt primordial des droits de l’enfant.
Nous avons pu lire dans la presse que le vote avait été négatif, est-ce exact ?
Oui et non. L’assemblée était très divisée. C’était pratiquement du 50/50. L’opposition a proposé des amendements sur la moitié des paragraphes. Par exemple, dans une phrase comme « les états devraient interdire la GPA commerciale », l’opposition demandait de retirer le mot « commerciale ». La phrase perd évidemment son sens premier. Certains amendements ont été acceptés, d’autres non. A la fin des débats, le texte n’avait plus aucun sens. En tant que rapporteure, j’aurais pu demander à ce qu’on retire le rapport puisqu’il ne correspondait plus à ce que je proposais initialement. Mais je voulais connaitre la décision finale.
Ils ont donc voté négativement.
Oui, et cela m’a étonnée vu le nombre d’amendements qu’ils avaient proposé. Comme je le disais, cela s’est joué de peu : 19 voix contre 17. Il a fallu ensuite voter les recommandations et là, coup de théâtre, elles sont votées favorablement à 17 voix contre 14. C’est une première dans l’histoire du Conseil de l’Europe.
Nous savons que la GPA est sujet à de nombreux débats, même au sein d’un même parti. Quelles sont les tendances ?
Clairement, en faveur d’une GPA légalisée et non commerciale, nous avons tous les partis de gauche et les libéraux. Dans l’opposition, on retrouve les partis conservateurs et donc les pays dirigés par ceux-ci : Europe de l’Est, pays soviétiques, … Les partis féministes sont habituellement « de notre côté » sur les thématiques difficiles comme l’avortement, l’euthanasie, … mais en ce qui concerne la GPA, ils sont farouchement contre.
La suite ?
Les recommandations vont se retrouver en plénière soit devant plus de 700 personnes et en débat public. Si on obtient 2/3 des votes on pourra demander aux états de prendre les choses en main, même si le vote n’aura aucun caractère obligatoire. Mon travail d’ici-là sera de rencontrer les états membres afin de leur exposer mon point de vue sur le sujet et les informer au mieux des enjeux de la GPA.
Ce n’est pas la première fois que nous faisons appel à Petra De Sutter puisque nous l’avions invitée il y a un an déjà afin de nous présenter ses travaux au sénat.
Un tas de questions reste en suspens : comment va réagir la plénière ? en cas de vote négatif, un nouveau dossier sera-t-il constitué ? des pays sont-ils prêts à légiférer quel que soit le résultat du vote ?
Vous vous en doutez, nous suivrons de près les débats en plénière et nous vous tiendrons informés des suites du dossier.